Il fallait compter sur deux jours froids. Un vrai changement, nous étions nombreux à avoir abandonné l’idée d’un hiver pour cette année, à avoir fait une croix sur le moindre flocon et voilà que ce matin le jardin était soudainement blanc, pétrifié et le sol dur. Le soleil, qui s’était fait discret cette dernière quinzaine, dessinait des ombres gigantesques autour des arbres, l’eau de la coupelle où viennent boire les oiseaux était gelée, il y avait un étrange silence. Par chance j’avais un bonnet logé dans mon blouson, je l’ai enfilé, remis mes mains dans mes poches et balançait avec ma bouche des volutes en direction de la lune qui brillait en plein jour, pile à la hauteur des branches du tilleul. La table de pierre était un rond blanc, le ying sans le yang et je me suis mis au travail.
Les filles pouvaient rigoler derrière la fenêtre et la fumée de leur chocolat chaud, j’espérais quand même qu’elles en retiendraient certaines choses, j’espérais que l’idée qu’il peut être bon de passer un moment dehors, même s’il fait guère plus de zéro, pourrait se nicher dans leurs petites têtes.
J’ai décollé la soucoupe de la table comme on retire le sparadrap d’un genou, à l’intérieur l’eau formait une patinoire minuscule. J’ai écarté les bords en plastics dans tous les sens pour décoller la glace mais elle tenait bon. Je suis rentré, sans faire attention aux regards interrogateurs ou moqueurs, j’ai rempli une bouteille d’eau assez chaude mais pas trop pour ne blesser personne, j’ai embarqué une veille éponge et suis ressorti en prenant soin de ne pas fermer la porte et vérifier que l’air frais ne les laissait pas indifférentes. Dans un craquement, un bruit à inquiéter le dernier ours polaire, la glace c’est détachée en un seul morceau dés le premier contact avec l’eau chaude. J’ai gardé ce disque compacte en main le plus longtemps possible, je me demandais où pouvaient bien être mes gants, puis je l’ai lâché au soleil, au pied du if. J’ai récuré la soucoupe, je l’ai rincé et remplie d’eau tiède, la fumée qui s’en dégageait voletait dans l’air, lançait des appels partout aux alentours.
dimanche,15 janvier, 2012 | Auteur: laurent
Catégorie: Faune
whaou pour tout. le style bien sur et la photo numéro 2. Aussi.