C’est un processus que nous avons eu du mal à décrypter. Cela ne se fait pas comme ça, en jouant au freesby par exemple. Alors nous avons arrêté notre partie, Marie me trouvait trop lent, pas assez concentré, chaque fois que j’entendais les cris, je tournais la tête pour essayer de comprendre ce qu’il se passait, pendant qu’elle, elle attendait que je veuille bien lui relancer la galette de plastique. C’était pourtant une bonne partie, nous avions trouvé des règles qui nous amusaient et cela faisait plus d’une heure que nous jouions sans nous lasser. Mais il se tramait quelque chose qui m’échappait à l’autre bout du jardin et après lui avoir montré du doigt un oiseau qui semblait s’élancer à tout bout de champ contre le mur, nous avons décidé d’étudier le phénomène.

Allongés dans l’herbe à quelques mètres du portail, nous avons observé le rituel de mère rouge-queue se percher sur le portail ou sur le fil électrique, faire des cabrioles puis se poser au sol en piaillant avant de s’élancer contre le mur et de s’envoler de nouveau jusqu’au portail.

Nous avons vite compris que la manœuvre consistait à attraper des moucherons pour ensuite les déposer quelque part sur le mur du jardin.
Cela se passe du côté des nichoirs, juste sous le pot de fleur accroché au mur (qui lui sert d’habitude de nid mais que cette année encore, elle semble avoir abandonné avant même d’avoir fini de l’aménager) et je commence à croire qu’il y a un nid dans un creux du mur, même si la hauteur semble improbable (vulnérable aux chats), même si j’aurai du le voir en photographiant les lézards et les araignées qui ont leurs habitudes à ces endroits-là.

J’ai demandé à Marie de bien suivre l’oiseau, d’essayer de repérer l’endroit exacte où il se débarrasse de sa proie. Nous sommes arrivés à la même conclusion, cela se passait sur le sol, sous la talle du cœur de Marie qui finit de faner tranquillement.  Un nid par terre, j’avais du mal à le croire. Etait-il tombé du pot de fleur ? Qu’est-ce que c’était donc que ce bordel ?

Nous en avons discuté, nous avons hésité, nous avons essayé d’estimer quels étaient les risques d’aller jeter un œil. Et puis Marie s’est décidé, elle a profité d’un nouveau départ de la mère pour passer sa main dans les fleurs. Elle s’est brusquement écarté un poussant un cri et un oiseau noir s’est envolé du massif pour se poser dans le poirier juste à côté.  Il nous a regardé l’air plutôt idiot. En voyant la masse noire jaillir j’ai cru un moment que c’était un merle, puis le père avant de me souvenir que les rouges-queues font de gros bébés duveteux. C’était donc cela, le petit se cachait. La mère revenue, elle l’a appelé un moment avant de le repéré et de l’engueuler.
Un peu empoté, il a réussi à la rejoindre au-dessus du portail pour recevoir la béquée. Quel lourdaud tout de  même !
Nous avons repris notre partie et pour faire durer le plaisir, nous avons décidé de ne pas arrêter tant qu’il n’y avait pas dix points d’écart.