"Alors si on veut voir des choses, faut pas attendre qu’il soit trop tard. C’est à 7h que tout se passe. "
Me suis couché sur ses bonnes paroles et comme je me suis réveillé à 4h30 cela ne coûtait rien de laisser couler jusqu’à 6h30 et d’essayer.
Il fait un peu frais et comme il fallait s’y attendre, tout est couvert de brume. Le soleil n’est pas levé mais cela ne saurait tarder et en arrivant à la Voie Creuse, la brume moins présente, le laisse apparaître.
Je n’ai pas suivi les instructions à la lettre, j’ai d’abord fait un crochet par le noyer pour la vue sur Maillot endormi et embrumé.
J’ai ensuite garé la voiture vers les abeilles. J’ai mis mes botes pour me diriger vers les ruches, vérifier que tout le monde dormait là dedans (de loin) puis j’ai contourné le bois par la gauche.
C’était tranquille et calme, quelques cris d’oiseaux de proie, quelques croassements et les nappes de brouillard qui se dissipent peu à peu.
Mais en arrivant au coin du bois, en débouchant sur la largeur du champ, un chevreuil qui broutait tranquillement au pied d’un bosquet me repère avant que je ne le vois et détale en quelques bons gracieux.
Gasp ! ça va vite ses machins là ! Et avant que je n’ai le temps d’ajuster l’appareil et de déclencher il est déjà loin…..
Je rigole intérieurement en voyant le résultat en photo. C’est pas gagné tout ça.
N’ayant plus rien à observer je continue mon petit tour du champ en contournant le bois où je fini par rentrer pour me cacher un peu et attendre.
En fait, il est déjà revenu. A bonne distance, au milieu du champ plus en amont, mais il est là se goinfrer tranquillement. Je sors doucement du bois que je longe sans faire de bruit (mais avec des bottes ce n’est pas l’idéal) pour m’approcher sans l’effrayer. Le bruit du déclencheur lui fait lever la tête. Je ne sais pas s’il me voit mais il reprend son occupation sans détaler. Sans doute qu’il a conscience de ma présente depuis le début mais qu’il me juge assez loin pour ne pas s’inquiéter. Je m’approche encore jusqu’à arriver à la lisière des arbres. Je n’irai pas plus loin au risque de le déranger. Nouveau bruit de déclencheur, il relève la tête. Mine de rien, il prend la direction du bois de l’autre côté du champ. Je le regarde faire son petit bout de chemin et je reprends le mien en direction de la route que le soleil commence à éclairer.
Avec la lumière les champs changent de couleur, les contrastes sont élevés, il y a des pointes de marrons dans tout ce jaune, et tient d’ailleurs je me demande si….
J’ai le soleil qui monte dans mon dos ce qui est une bonne nouvelle pour la lumière et aussi peut être pour passer inaperçu. Ils sont quatre ou cinq, avec le reste de brume j’ai du mal à les distinguer. Un petit est éloigné du groupe mais je ne me fais pas d’illusion, plus j’approche de la route, plus ils s’avancent vers le bosquet et l’ombre. J’attends un peu, le petit ne se décide pas à rejoindre les autres alors je m’engage dans le chemin trempé, il semble un interpellé, curieux et me regarde avancer. Les autres sont déjà cachés, dans les ronces et les hautes herbes, lui semble vouloir en savoir plus, alors je m’approche doucement. Je suis a une vingtaine de mètres, il prend une bonne partie du cadre, je ne bouge plus. Il hésite, commence à rentrer dans le bosquet puis en ressort pour me regarder à nouveau. Il prend la pause, je déclenche une dernière fois et fais demi-tour. Après quelques mètres lorsque je me retourne il n’est plus là.
Je reprends la route pour rejoindre la voiture et je les vois tous ensemble dans le champ, je me met en position pour une dernière photo de groupe, geste qui aussitôt sème la panique et ils détalent en ligne, en de grands sauts efficaces.
